Née de la côte d’Adam, Nuruddin Farah

Né il y a soixante-sept ans en Ogaden, région du sud de la Somalie que l’Ethiopie fit sienne officiellement en 1961, Nuruddin Farah est la figure emblématique la plus connue de ces écrivains que leurs maîtres coloniaux d’hier qualifient aujourd’hui de remuants, leur collant une appartenance à une supposée littérature d’émergence qui regrouperaient à leur grand dam tous ces écrivains faisant surgir de leur mémoire libérée des flots tumultueux du colonialisme hégémonique et triomphant et de ses ruines honteuses, leurs maux actuels et passés. Condescendance quelque peu paternaliste, d’autant plus que les thèmes abordés par cet écrivain sont empreints d’universalité, même s’ils s’inscrivent dans le cadre précis de la Somalie, sans aucun doute plurielles pour Nuruddin Farah.

Dans Née d’une côte d’Adam, la jeune Ebla, vendue par son grand-père à un vieillard qu’elle n’a jamais vu, a le choix : assumer ce mariage et ce qu’il suppose de chemin tracé ou vivre son refus. Elle choisit de se donner une opportunité, celle de grandir pour et par elle-même et part pour Mogadiscio, afin de donner le sens qu’elle veut à sa vie. Sans se départir du bon sens paysan que lui a procuré l’observation constante de la Nature, elle fera l’expérience de l’équilibre précaire qui sépare la soumission de la liberté et découvrira en elle non seulement sa masculinité en se conduisant comme le font la plupart des hommes – elle devient, par exemple, polygame – en se glissant d’une certaine façon de l’autre côté du miroir, mais aussi ce que signifie la féminité et être femme.

Ce livre reste, à mon avis, l’un des meilleurs de ceux que j’ai lu de Nuruddin Farah, l’un des plus imprégnés de fraîcheur, peut-être parce qu’il n’est pas encombré de toutes ces métaphores et références culturelles, qu’elles proviennent de la culture orale somalienne ou de la littérature occidentale dont Farah a une connaissance foisonnante, qui finissent par étouffer la plume de cet écrivain, rendant son style parfois indigeste, ses descriptions empreintes d’une poésie si lourde qu’il n’en surgit aucune vision et la lecture de ses ouvrages, pesante par leur hermétisme apprêté, voire de mauvais goût.

 

© L’Ombre du Regard Ed., Mélanie Talcott – 7/07/2012.
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Née d’une côte d’Adam, Nuruddin Farah
Serpent à plumes

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Publié sur Passion Bouquins

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