Point Oméga, DonDeLillo

C’est une histoire bizarre, une histoire qui ne s’écoule pas, qui ennuie même. Il semble qu’il ne se passe rien, du moins rien de ce que l’on attend habituellement d’un univers romanesque. Pas d’intrigue, pas de héros. Juste le temps qui s’englue autour de trois êtres humains, acteurs et spectateurs du temps qui passe sans que rien ne s’y inscrive. Un cinéaste, Jim Finley, en constante projection privée dans sa tête visionnant des films improbables, ceux qu’il ne fera jamais, un vieil intellectuel conservateur et misanthrope, Richard Elster, vivant en ermite dans une maison bouffée par le désert d’Arizona.

Finley attend. Il attend qu’Eltser veuille bien lui expliquer comment il a aidé le Pentagone à conceptualiser par le langage, la guerre en Irak. Il attend de faire son film, tout en sachant qu’il ne le fera jamais. Richard Elster attend, bien qu’il n’attende plus rien, sinon sûrement la mort, polie par ses pensées qui tournent en boucle entre ses idées d’extinction et d’évolution, et peut-être aussi sa fille Jessie, qui attend, elle aussi, et passe comme une ombre dans le paysage avant de s’y engloutir. Ils boivent, mangent, parlent peu, reboivent encore et attendent.

Entre ses trois personnages, figurés comme des hologrammes d’eux-mêmes, comme un intermède fiché dans l’esprit du lecteur, la vidéo de Douglas Gordon, 24 Hour Psycho d’après Psychose d’Alfred Hitchcock qui se découpe pendant vingt-quatre heures en images autopsiées de lenteur, quelque part dans une salle obscure du prestigieux MoMa newyorkais.

Récit tout en digressions, déroutant, irritant, concis pour atteindre, peut-être, ce point Oméga, où l’on cesse de se voir soi-même et à partir duquel notre destin semble nous contempler. Trop énigmatique et trop cérébral.

Point Oméga, Don DeLillo
Actes Sud

L’auteur
Avec quinze romans et deux pièces de théâtre, Don DeLillo s’est aujourd’hui imposé comme un auteur culte sur le plan international. Il a obtenu les distinctions littéraires les plus prestigieuses dont The National Book Award, The Pen / Faulkner Award pour l’ensemble de son œuvre et The Jerusalem Prize en 1999. Récemment parus chez Actes Sud : Cosmopolis, L’Homme qui tombe, Point Oméga (2010) et Great Jones Street (2011). En 2008, Actes Sud a également publié un premier volume de ses œuvres romanesques en Thesaurus (Œuvres Romanesques, tome 1) contenant cinq de ses premiers romans (1971-1989) : Americana, Joueurs, Les Noms, Bruit de fondet Libra.

© L’Ombre du Regard Ed., Mélanie Talcott  – 2013
Publié sur Passion Bouquins

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