La fille de Kali, Céline Denjean

Voilà un bouquin, La fille de Kali de Céline Denjean, qui est fort bien fait et bien écrit. Tout y est.

L’intrigue bien ficelée : des meurtres à gogo dont le cérémonial un tantinet gore nous emmènent au coin culture, à savoir le culte de Kali en Inde, fort bien documenté par l’auteur.

Des protagonistes taillés au cordeau. Exit l’éternel inspecteur, macho alcoolique déglingué, en fugue mi lucidité funèbre mi-j’aimerais-y-croire-quand-même, désespéré du compagnonnage de ses frères humains, sauf quand il s’agit de sauter une pute ou de se brûler la fierté avec une femme qui se refuse. Cette fois, le flic qui mène la charge est une femme, Élise Bouquet, une forte en gueule, avec tout le paquet de forces et de faiblesses qui vont avec : se faire accepter par ses pairs, des hommes couillus, qui voient mal une gonzesse grimper au même cocotier qu’eux et rafler la mise, à savoir le succès de l’enquête et les lauriers qui vont avec, dont l’avancement sur l’escalier hiérarchique . Ou encore affronter la guerre minable entre les différentes polices et les procureurs qui jouent la traque au meurtrier comme des mômes qui partent à la chasse au trésor.

Son équipe est bien torchée : le flic bras droit, Jean-Marc, la quarantaine bien balancée, chevalier servant féru de citations géniales et d’un grand appétit pour tout ce qui se mange et se boit dont elle tombe amoureuse ; le flic romantique, doux rêveur un peu bobo, Thibault, qui en pince pour sa coéquipière lesbienne, Maïa ; l’indispensable geek, Kamel, qui fracture avec brio tous les comptes virtuels de n’importe quel citoyen. Ajoutez à cela deux personnages interlopes, mais non dénués d’attraits pour pimenter la sauce : Amanda Kraft, journaliste ambitieuse et sans scrupules qui vend son cul et son âme contre des infos du moment que son nom fait la Une, et un flic véreux reconverti en détective privé, Danny Chang, une montagne de chair dissimulant un cerveau perspicace et obstiné. Et vous aurez tous les ingrédients préalables à un bon thriller, malgré quelques longueurs qui émaillent l’enquête.

Reste à y mettre l’ambiance, entre les meurtres où les victimes sont parfaitement cadrées dans leurs veuleries et leurs trahisons, le découpage rituel des têtes, un cadavre retrouvé apparemment suicidé au fond d’une tourbière, mais qui ne se trouve pas dans l’intrigue par hasard, et le ou les assassins dont je ne dirais rien afin de ne pas couper l’herbe sous le pied au lecteur.

Quant aux descriptions, elles sont visuellement suggestives et les dialogues ajustés pile poil à la gouaille et à la carrure de chaque protagoniste… Ni trop ni trop peu.

En conclusion, un excellent bouquin pour passer un bon moment sans se prendre le chou, comme l’on dit populairement.

Néanmoins pour être tout à fait sincère, je me suis demandée avant d’écrire ces quelques lignes ce que j’allais pouvoir dire au sujet de cette Fille de Kali, après m’être posé cette simple question : qu’est-ce que la lecture de ce bouquin, qui – et j’insiste là-dessus – est techniquement très bon, t’a apporté ? Côté découverte, côté émotions, côté waouh ! : néant. La mayonnaise ne prend pas pour cause d’overdose. Le thriller, la romance, la fantasy et j’en passe sont devenus des genres, purs produits de marketing littéraire copier-coller. Il faut faire du chiffre avec ce qui marche, soit. Mais à trop inonder le marché du livre de bouquins « décoiffants », « époustouflants », « dont on ne sortira pas indemne», au « suspens haletant », « véritables déflagrations », « gros coups de cœur », « J’ai refermé ce livre scotché et il m’a fallu du temps pour reprendre pied avec la réalité. », entre les Chattam, Thilliez, Coben, Bussi, Grangé pour les plus courus, le thriller s’essouffle, comme l’enthousiasme. C’est un peu comme remettre au four, dix fois le même dessert.

A force de vouloir ratisser large pour pêcher du lectorat, la créativité se crame les ailes.

 

© L’Ombre du Regard Ed., Mélanie Talcott –26/05/ 2017
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La fille de Kali
Auteur : Céline Denjean
Éditions :Marabout (28 septembre 2016)
Collection : Thriller
ISBN : 9782501114479
504 pages

Quatrième de couverture
Toulouse : Éloïse Bouquet, de la Section de Recherches de la Gendarmerie, découvre Maurice Desbals, un ingénieur a priori sans histoire, dont le corps décapité a fait l’objet d’une macabre mise en scène : sur le mur, un swastika tracé avec le sang de la victime et, au pied du lit, un tas de piécettes et des pétales de fleurs faisant penser à une offrande. La tête du défunt, quant à elle, demeure introuvable…
Vengeance, règlement de comptes, acte de barbarie à connotation sectaire ? Alors que l’enquête peine à démarrer, un meurtre identique est perpétré un mois plus tard à quelques kilomètres de la ville rose. Le spectre redouté d’une tueuse en série s’inspirant de la déesse Kali se matérialise alors…

Pour en lire un extrait

Biographie de l’auteur
Céline Denjean est née à Toulouse en 1974, et a grandi dans les Hautes-Pyrénées. Après des études de droit dans « la ville rose », elle cède à son attrait pour la psychologie et les sciences humaines en intégrant la formation d’Éducatrice Spécialisée. Depuis huit ans, elle est chef de service auprès de jeunes présentant un handicap mental et elle consacre son temps libre à sa passion : l’écriture. En 2015 elle publie son premier roman : Voulez-vous tuer avec moi ce soir ? En 2016 c’est La fille de Kali. À paraître en 2017 : Le Cheptel.

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