Jeux du Je…

JE … Consonne contre voyelle. Deux lettres, la première doublant l’autre dans la position alphabétique… Redondance suspecte, prémonitoire peut-être. Car le voilà qui à peine né, se gonfle déjà de son importance, effaçant sur son passage le moindre mot que son vocabulaire ne reconnait pas. Le voilà qui pense, qui est frappé par, qui a une opinion publique sur tout dédaignant l’intime conviction, moins tapageuse. Le voilà qui a des émotions se faisant écho de ses hormones, cherchant un sens existentiel à ses sueurs intimes, alignant la raison comme une justification philosophique, voire scientifique, à tout ce qu’il accepte, le soumet et le broie. Il aime, il n’aime plus ; il veut, il ne veut plus ; il proteste et néanmoins collabore ; il peut et ne fait pas. Il s’engage, il se désenchante, il s’indigne mais JE ne s’implique pas. S’interroger ? Poser l’essentialité du pourquoi ? Il préfère trop souvent s’en tenir au comment, plus séduisant dans les polémiques qu’il soulève dans son sillage. Quant à partager, ce qui le sauverait sans doute et certainement le ferait grandir, JE n’y songe même pas, tant il tient à ce qu’il pense être son identité – hors du commun bien sûr – et qui n’est rien d’autre que la déroute de tout ce qu’il n’est pas.

© L’Ombre du Regard Ed., Mélanie Talcott  – 29 décembre 2011

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